LA STRATEGIE DE LA DG CONCURRENCE N’A PAS PREPARE
LE MARCHE DE L’UE AU MONDE DU XXIe SIECLE,
ET CONTRIBUE AU DECLIN TECHNOLOGIQUE EUROPEEN
AU-DELA DES POLEMIQUES ACTUELLES, IL FAUT LA REFORMER EN PROFONDEUR ET AVOIR DES POLITIQUES INDUSTRIELLE ET DE LA CONCURRENCE QUI SERVENT VERITABLEMENT LES CITOYENS EUROPEENS
17 juillet 2023
Berlin, Bruxelles, Londres, Paris, Tallinn, Varsovie
La polémique autour de la nomination de Mme Scott Morton est révélatrice d’un problème bien plus grave qui touche la DG Concurrence (DG COMP) et qui n’est pas assez souligné : celle de l’absence de résultat de cette administration depuis plus de 20 ans dans le domaine du numérique et des technologies.
Son échec peut être analysé à différents niveaux. D’abord par l’inefficacité de son mode d’action : sur les 25 milliards Euros d’amendes infligées depuis 15 ans, seuls environ 3,5 milliards d’Euros ont été payés, soit moins de 1,5% du résultat net des GAFAMs pour la seule année 2021.
Puis par l’absence d’impact de ses décisions sur l’émergence de monopoles numériques gigantesques. Jamais la puissance de ces dernières n’a été aussi importante que depuis que la Commission agite ses moulinets : la capitalisation boursière des 7 plus gros géants de la tech atteint 11 trillions de dollars, dont 4 trillions de plus sur la seule dernière année. Derrière les grands effets d’annonce en provenance de Bruxelles, il est temps de demander des comptes sur l’effectivité de la DG Concurrence pour les citoyens européens.
Une autre raison de cet échec pourrait être la composition de la DG COMP dont on estime que près de 80% de ses fonctionnaires ont une formation de juriste sans expérience réelle des secteurs technologiques qu’ils sont censés réguler. Deux cas emblématiques où la DG Concurrence n’a quasiment rien vu : Whatsapp racheté par Facebook – et qui écrase la concurrence des messageries instantanées – ou Deepmind par Google, qui par ce biais a aspiré un grand nombre des talents européens en IA.
Le déclassement technologique Européen est généralisé : dans l’IA, les semiconducteurs, le cloud, le spatial, la cyber – aucune société européenne dans le top 20 des plus grandes sociétés mondiales, à part LVMH. L’Europe doit urgemment mettre à jour sa doctrine de politique de la concurrence et plus largement de politique industrielle. C’est là où le recrutement de Mme Scott Morton n’est pas dénué de piquant car il met en lumière que nous avons peu renouvelé nos théories économiques, comme le prouve l’absence de résultats réellement tangibles à ce jour des IPCEI dans le domaine industriel, ou notre incapacité à trouver une réponse percutante à l’Inflation Reduction Act (IRA).
« Plus qu’une Chief Economist, c’est d’une Chief Strategist ou d’une Chief Scientist, et d’une vraie vision technologique, dont l’Europe a véritablement besoin » indique André Loesekrug-Pietri, Président de la Joint European Disruptive Initiative, l’initiative européenne pour l’innovation de rupture, l’ARPA européenne.